Litté-13
Couverture La Trilogie des jumeaux, tome 1 : Le Grand CahierTitre : Le grand cahier 
Auteur : Agota Kristof 
Parution : 1986 
Pays : Suisse 

Type : Drame – Historique 
Genre : Roman 

Résumé : Klaus et Lucas sont jumeaux. La ville est en guerre, et ils sont envoyés à la campagne, chez leur grand-mère. Une grand-mère affreuse, sale et méchant, qui leur mènera la vie dure. Pour surmonter cette atrocité, Klaus et Lucas vont entreprendre seuls une étrange éducation. Dans un style enfantin et cruel, chaque événement de leur existence sera consigné dans un « grand cahier ». 

Note : 10/10 
Avis : Dès que j’ai lu les premières lignes, je ne pouvais plus décrocher. Je n’ai pas cessé de le lire avant de l’avoir terminé, en une soirée, alors que ça faisait un moment que ce n’était pas arrivé depuis un long moment. Je n’ai entendu que du bien de ce roman, et je n’en suis pas du tout déçue. 
Jamais nous ne sommes réellement situés dans le temps, mais puisqu’il s’agit d’une guerre, je suppose que l’auteure l’a écrit par rapport à la guerre qui s’est passée en Hongrie entre les militaires soviétiques et les anti-communistes – elle s’est exilée, à la suite de ce conflit. Les jumeaux doivent apprendre à vivre auprès de leur grand-mère qu’ils rencontrent pour la première fois, alors que leur mère ne peut plus s’occuper d’eux. C’est ainsi que débute l’histoire : on assiste, tout le long, à l’évolution psychologique des jumeaux qui ne forment qu’un, qui jamais ne vont s’identifier individuellement. C’est toujours : « nous disons, nous faisons, etc. », ce qui met en place sans explications la relation entre les deux frères qui ne peuvent se voir l’un sans l’autre. 
L’écriture de Kristof, qui a appris le français en arrivant en Suisse à vingt-et-un ans, est simple mais entraînante. La complexité réside plutôt dans les personnages, en particulier les jumeaux, mais leurs entourages aussi qui semblent vivre selon leurs désirs et non les lois – du moins, les jumeaux et leur grand-mère. Il n’y a aucun héros dans ce roman : ils ont tous des défauts, ils sont tous imbus d’eux-mêmes, bref, ils sont tous des anti-héros ou sinon des personnages neutres. 
Comme le dit L’Express : « Un roman magnifique sur le déracinement, la séparation, l’identité perdue et les destins brisés dans l’étau totalitaire. » Je ne pourrai même pas dire mieux. 

Extrait : « Nous ne voulons plus rougir ni trembler, nous voulons nous habituer aux injures, aux mots qui blessent. »




Couverture La Trilogie des jumeaux, tome 2 : La PreuveTitre : La preuve 

Auteur : Agota Kristof 
Parution : 1988 
Pays : Suisse 

Type : Drame – Historique 
Genre : Roman 

Résumé : Dans un pays en guerre, deux jumeaux se séparent. L’un d’eux franchit la frontière, laissant l’autre désemparé, privé d’une partie de lui-même. Lucas semble vouloir se consacrer au bien. Quand Claus revient, trente ans plus tard, Lucas a disparu. Seule preuve de leur existence commune : le Grand Cahier. 

Note : 9/10 
Avis : Ce n’est pas mon favori, dans la trilogie, mais il reste un excellent livre. Il y a moins de vulgarité que dans le premier, mais on fait face à un univers encore plus noir. On reste avec Lucas, qui se retrouve seul depuis le départ de son jumeau, et qui se sent plus vide de jamais. Si le début m’a enchanté, la fin a été longue, mais c’était tout de même un excellent roman. Peut-être parce que le premier tome est si élevé dans mon estime que je m’attendais à beaucoup venant du tome deux. Mais, jamais je ne me plaindrai de cette lecture qui fût très agréable. L’écriture simple mais particulièrement attirante de l’auteure m’empêchait tout de même de décrocher : je revenais sans cesse vers ce roman, dès que j’avais le temps entre deux travaux scolaires. L’histoire, en tant que tel, comme je l’ai dit est très noir, mais se situe entre la fin de la guerre sous la domination de l’étranger mais aussi entre la fin de cette domination, justement, puisqu’à la fin l’ennemi a quitté le pays qui se retrouve enfin libre. Lucas, comme personnage, est très froid, imbu de lui-même, très complexe, égoïste, mais à la recherche de l’amour de quelqu’un suite au départ de son frère jumeau. Que ce soit avec une femme ou encore avec un enfant handicapé, il les aime un peu trop, jusqu’à causer la perte de l’un des deux d’une manière très tragique. Un deuxième tome parfait comme transition. 

Extrait : « Je n’étais encore qu’un enfant. Mais je n’ai rien oublié. »




Couverture La Trilogie des jumeaux, tome 3 : Le Troisième mensongeTitre : Le troisième mensonge 
Auteur : Agota Kristof 
Parution : 1991 
Pays : Suisse 

Type : Drame – Historique 
Genre : Roman 

Résumé : Et si l’existence était un mensonge ? Au terme de cinquante années d’exil, Lucas revient dans sa ville natale pour y retrouver Claus, son frère jumeau. Ce dernier est devenu écrivain et se fait appeler Claus Lucas. Lors des retrouvailles, il niera l’existence de Lucas. Ce frère existe-t-il vraiment ? Lucas parviendra-t-il à se défaire de son double ? 

Note : 9/10 
Avis : Le dernier tome de la série, et je ne suis pas déçue, bien que je me sois de nouveau attendue à mieux. Mais, c’est tout de même une manière parfaite de terminer une trilogie qui a commencé sur une note très haute. De nouveau, l’écriture de l’auteure m’a envoûté. Elle est simple, mais on voit qu’elle a mûri un peu au fil du processus d’écriture. Ici, c’est des révélations qui nous laissent perplexe. Qu’est-ce que la vérité ? Où sont les véritables événements, dans les trois romans ? Je ne vous dirai pas plus, je n’ai pas envie de vous gâcher la lecture, mais même après avoir terminé ma lecture, je reste avec plusieurs questions qui ne pourront jamais être assouvies, l’auteure étant morte. Je ne peux que supposer plusieurs choses qui peuvent se révéler fausses, mais c’est l’intention de l’auteure. Elle ne veut pas nous dire tout ce qui se passe réellement. Et c’est sur une note sombre, même cruelle, qu’elle nous laisse les questions en suspens. Mais la lecture de cette trilogie dont je n’ai entendu que du bien en valait la peine, énormément. Je suis très heureuse et je vais réitérer l’expérience avec Agota Kristof. Ce troisième tome est sombre, mais beaucoup moins violent que le premier et moins vulgaire, malgré qu’on voit dans les analepses les moments difficiles de la guerre. 

Extrait : « C’est pour toi que je suis revenue. »
Litté-13
Couverture Une si longue lettreTitre original : Une si longue lettre 
Auteur : Mariama Bâ 
Parution d’origine : 1979 
Pays : Sénégal 

Type : Contemporain – Féminisme 
Genre : Roman 

Résumé : Une femme sénégalaise écrit à son amie pendant la réclusion traditionnelle qui suit son veuvage. Elle évoque alors leurs vies, leur rencontre en tant que jeunes étudiantes, leurs mariages, leurs espoirs, leurs déceptions … Une belle façon de parler de la place de la femme au Sénégal, de la polygamie, de l’islam ou de la force des traditions. 

Note : 10/10 
Avis : Ce roman fût une véritable découverte. Je m’intéresse au mouvement féministe depuis longtemps, et depuis mon cours de littérature francophone d’Afrique et des Antilles, je suis intéressée à celui qui émerge là-bas, même si on ne peut pas parler de « féminisme », ce n’est pas la même chose qu’en Occident. Les femmes ont commencé à écrire dans les années 70, en Afrique, et Mariama Bâ a écrit le premier roman féministe africain, qui se révèle être une très belle découverte dont la lecture sera renouvelée, encore et encore. C’est avec une grande sensibilité qu’elle nous livre le récit d’une femme qui, prisonnière d’un mariage polygamique, vit maintenant le deuil de son mari qui l’a délaissé pour une femme de l’âge de sa fille aînée – la meilleur amie de sa fille aînée, d’ailleurs. Si le roman touche une certaine note négative face à ses espérances, sa vie conjugale qui tombe « en ruine » sans qu’elle ne puisse rien y changer, il se termine néanmoins d’une façon très positive, devant un avenir qui semble améliorer tout de même les choses. L’écriture de l’auteure est magnifique, simple, s’inscrit dans un registre familier, mais elle est parfaite. Elle convient au type de récit qu’elle nous livre, au personnage sincère qu’est la narratrice, Ramatoulaye, qui ne se gêne pas pour souffrir elle-même afin de dévoiler à sa meilleure amie ses sentiments, ses rêves brisées, sans jamais entré dans l’exagération, le mélodramatique qui a tendance à gâcher les drames. 

Extrait : Le mot bonheur recouvre bien quelque chose, n’est-ce pas ? J’irai à sa recherche.
Litté-13
Couverture Derrière toute chose exquiseTitre : Derrière toute chose exquise 
Auteur : Sébastien Fritsch 
Parution : 2014 
Pays : France 

Type : Drame 
Genre : Roman 

Résumé : Depuis près de vingt ans, Jonas Burkel photographie toujours la même femme : seul le prénom change. Mais plus que les brunes longilignes au regard perdu, il semble que son vrai grand amour soit ses habitudes : ses disques de piano jazz, ses errances dans Paris … et ces corps féminins dociles et invariables. 

La fille qu’il découvre dans un train de banlieue, accrochée à un roman d’Oscar Wilde, semble la candidate idéale pour prolonger la série : il oublie immédiatement son précédent modèle, imagine déjà sa nouvelle conquête devant son objectif, dans des rues sombres, sous la pluie, sous ses draps … 

L’idée qu’une femme puisse refuser son petit jeu sentimental ne lui traverse même pas l’esprit. Mais comment pourrait-il deviner que, tout comme lui, la lectrice du train n’accepte aucune règle sinon celles qu’elle invente ? Et que tous ceux qui l’approchent doivent s’y plier : jusqu’à y jouer leur vie. 

Note : 2/10 
Avis : J’aimerai remercier Livraddict et l’auteur pour ce partenariat et m’excuser du retard, les études m’ont occupé ensuite l’hospitalisation du père de mon petit ami et mon travail qui ne me lâche pas. Bref, je l’ai enfin terminé et je vous donne enfin mon avis. Les premières lignes m’enchantaient, le premier chapitre était convaincant, mais ensuite sont arrivés les éternels clichés. Bon, je n’ai rien contre les clichés, ils m’emmerdent tout simplement puisqu’ils n’apportent aucune originalité à moins que l’auteur arrive à nous stimuler en « transformant » ces clichés, si l’on veut. Ici, je les ai trouvés fades. L’homme solitaire, intelligent, photographe, prit par la passion du jazz … enfin, la « passion du jazz », il écoute tout simplement un seul en boucle – Oscar Peterson, mais je ne juge pas ses goûts car il est excellent -, qui change constamment de femmes et, d’ailleurs, il n’en prend que des plus jeunes – d’une vingtaine d’années, qui plus est. 

Parlons du personnage : Jonas. C’est probablement le personnage masculin le plus antipathique que j’ai croisé dans mes lectures – et j’ai vu plusieurs « antiféministes » dans les romans, mais celui-ci … non, incapable. La manière dont il traite les femmes m’horrifie, cette chosification bestiale et obscène … Quand il parle d’elles, j’ai pitié d’elles. Quand il traite Margot de folle, c’est elle que je prends en pitié, probablement parce que sa froideur, cet homme imbu de lui-même qui n’éprouve absolument rien me rappelle mon ex … Ah et j’ai remarqué que les femmes qu’il choisit sont souvent des femmes sans ressources, en détresses : jouer le chevalier servant pour ensuite les laisser tomber alors qu’elles viennent de retrouver leur confiance en elle … Non. Au fil de ma lecture, j’espérai vraiment me raccrocher à l’histoire : le style d’écriture de l’auteur est très belle, elle me plaît, mais c’est le personnage le problème, les clichés parsemés ici et là … et finalement, je suis arrivée à une phrase : « Pour la première fois de ma vie, j’ai obéi à une femme. » Et là ce fut fini. Jamais, au grand jamais je ne pouvais aimer ce roman par la suite ou encore m’intéresser à Jonas Burkel et du coup, à l’histoire elle-même qui est quand même confuse par moment – on passe d’une chose à une autre, et j’ai lu des romans beaucoup plus complexes avec des analepses et prolepses beaucoup plus claires que j’ai compris du premier coup … 

Enfin, bref, une lecture extrêmement désagréable, malgré un style remarquable. Le résumé était tentant, il différait de toutes mes lectures du moment, je ne pensais pas non plus tomber sur un personnages aussi sexiste. Et les femmes dans cette œuvre sont aussi vivantes qu’un cadavre. 

Extrait : « Pour la première fois de ma vie, j’ai obéi à une femme. »